Photo extraite du site meinsalzburg.com
Le travail de Tony Cragg dans son ensemble me semble très intéressant. C’est un artiste qui, tout en restant dans le même domaine, à savoir la sculpture, arrive à surprendre à chaque fois le spectateur.
Round the block, 2003 - legno
Ce qui m’a frappé en premier, c’est l’évolution rapide et soudaine du travail de cet artiste, passant de matériaux manufacturés, fabriqués par d’autres, à des matières pures, nobles et n’ayant plus aucune symbolique ni fonction. Ce cheminement me semble intéressant, la manière dont Tony Cragg considère la matière ; il la voit à la fois comme une structure, élément indispensable de sa sculpture, mais aussi comme un vecteur de pensée que le sculpteur doit investir. Il n’est pas dans la recherche formelle mais la recherche de sens, c’est ce sens qui viendra modeler la sculpture. Il appelle d’ailleurs ses oeuvres non pas des oeuvres «abstraites», mais des oeuvres « non-representatives» (ou «non figuratives»). Elles ne représentent rien de défini, mais sont pourtant bien vecteur de sens, le sens que l’artiste à voulu lui donner.
New Stone - Newton Stones, plastic, 1978
Cette notion de sens demande l’intervention du spectateur ; car si le sculpteur s’investit dans son oeuvre, il faut un «recepteur» à ce sens, ces intentions. Ce jeu entre le sculpteur/la sculpture/le public m’a particulièrement plu aussi. En effet, si Tony Cragg veut faire passer des messages à travers ses oeuvres, il mesure l’importance et l’influence du regard du spectateur et joue avec cette notion, aussi bien au début de son travail qu’aujourd’hui.
Photo de l'exposition Nothing but material, 2006
La dernière notion que j’ai retenu du travail de cet artiste est quelque chose qu’il dit lui même, par rapport à l’utilité de la sculpture et qui peut, selon moi, être rapproché du design. Une phrase m’a marquée, dans une interview : « A lot of people look at objects on a scale of usefulness. They think, “This is a good object because I can use it well. And if I can use it even better, then it’s a better-looking object ». Ainsi, si l’on suit ce raisonnement, l’utilité, le bon fonctionnement d’un objet le rend beau. La sculpture serait donc en bas de cette échelle? Tony Cragg se bat contre cette idée, car dans sa recherche de sens dans la matière, il lui donne une utilité, selon moi, au même titre qu’un article de journal par exemple, lui aussi vecteur d’opinion, et de sens. Tony Cragg rend la sculpture «utile». De plus, sa recherche d’objets «non formel» mais investis de sens est, pour moi, une recherche pouvant grandement influencer le design, et plus particulièrement la sémiologie des objets. En effet, ce type de recherche pourrait être appliqué au domaine du design, afin de faire évoluer la manière dont les objet peuvent communiquer des choses sans pour autant avoir recours à des codes déjà convenus (texte, mode d’emploi).